Tagada Jones - À feu et à sang Tagada Jones fait partie de ces groupes que je respecte essentiellement pour son parcours. La certaine idée de l'indépendance et du do-it-yourself du quatuor rennais s'est concrétisée par une belle réussite pour un groupe de rock en France (c'est-à-dire avec peu d'exposition médiatique et encore moins de reconnaissance du grand public). Un groupe engagé, enragé et à la crédibilité indiscutable. Plus de vingt-cinq piges sans interruption, un line-up stable depuis un bail, des tournées à n'en plus finir partout en France et même ailleurs (ce qui n'est pas négligeable pour une formation chantant en français) et surtout une véritable machine de guerre en live et sur skeud. Respect. Et À feu et à sang, le petit dixième, ne va pas mettre en péril la formule qui gagne.

Et la formule qui gagne est toujours la même (ou presque). Un crossover de rock alternatif, de punk et de metal hurlé/scandé en français où les tubes se mélangent aux brûlots revendicatifs et contestataires. Et quand je parle de brûlot, c'est aussi bien au sens figuré (la musique) qu'au sens propre (les paroles de "À feu et à sang" qui ouvre avec conviction l'album). Tout a été dit ou presque sur Tagada Jones, et pourtant, j'ai toujours plaisir à écouter les nouvelles productions du groupe (même si j'ai tendance à me lasser assez vite du type de chant de Niko Jones). Les amateurs de Tagada Jones ne seront pas décontenancés (même si quelques boucles et sonorités électro bien senties pourraient surprendre), et les nouveaux fans prendront cher avec la succession de knock out. Le champ lexical emprunté par le groupe est (comme toujours) puissant et affirmé (feu-sang-rage-larmes-lion, rien que pour les titres des morceaux), au même titre que la production aux guitares massives et au basse-batterie bien mis en valeur. Les textes sont de véritables pamphlets contre les maux de notre société (mention spéciale à "La biche et le charognard" et son chakal prédateur sexuel), mais non vides de sens. Profondément révoltées, les paroles bousculent plus qu'elles ne critiquent gratuitement sans fondement. Seul bémol : j'ai vraiment du mal à comprendre l'intérêt de "Elle ne voulait pas", titre (mal) chanté avec Didier Wampas en milieu d'album qui fait certes retomber la pression, immédiatement balayé par "De rire & de larmes", le titre qui lui succède, alternatif à souhait en mode béru des temps modernes. Incompréhensible. Rien à voir avec l'alien "Magnitude 13", titre lent et bouleversant, qui aurait pu être l'œuvre de No One Is Innocent et clôturant avec originalité et mélancolie un album gavé de rage et d'espoir. Bravo Messieurs.